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"Car tout être humain peut créer un monde immatériel habité de toutes ses créatures immatérielles
et regorgeant de sujets immatériels semblables à nous, et tout ceci dans l'espace d'un cerveau ou
d'un crâne ; et même davantage : il peut inventer un monde selon sa fantaisie,
avec la forme de gouvernement qui lui plaît, donner à ses créatures tous les mouvements,
les constitutions, les formes, les couleurs, les manières de percevoir, etc., qu'il jugera bons,
et créer des tourbillons, des lumières, des pressions et des réactions, etc., à son gré.
Ainsi, il peut par exemple faire un monde plein de veines, de muscles et de nerfs et
les mettre en branle d'une simple chiquenaude ou d'une caresse de la main ;
tout comme il peut altérer ce monde aussi souvent que cela lui chante,
ou le faire passer de l'état de monde naturel à celui de monde artificiel.
Il peut inventer un monde d'idées, un monde d'atomes, un monde de lumières
ou tout ce que son imagination lui dicte.
Et puisqu'il est en votre pouvoir [concluent les esprits]
de créer un tel monde, quel besoin avez-vous de risquer votre vie, votre réputation et votre tranquillité
pour conquérir un vulgaire monde matériel ?"

Margaret Cavendish, Le Monde glorieux, trad. fr. Line Cottegnies,
Paris, Éditions José Corti, 1999, p. 158-159. Cavendish (1623-1673) est la véritable descendante
de Bacon dans cette utopie qui, si fantastique qu'elle soit, se fonde sur un jeu de construction
avec des éléments « scientifiques » tirés de toutes les théories en vigueur à son époque,
y compris celles de Descartes et de Hobbes, qu'elle prétendait avoir connus personnellement.
Le constructivisme célèbre son couronnement dans l'ambition qu'elle avait de ne pas « seulement être l'Impératrice,
mais bien la Créatrice d'un monde entier » (p. 255).

Si l'on prête attention aux médias, en cette période de crise les auteurs mettent la prospective au goût du jour.
Cela fait pourtant longtemps qu'un regard spéculatif sur la société est porté par les auteurs de littérature d'anticipation
et certains philosophes analytiques anglo-saxons. Alors que Jacques Attali commet une brève histoire du futur
et que Paul Virilio enfourche son "Université des Catastrophes" ;
les éditions Milo présente un passionnant ouvrage de Fredric Jameson sur l'utopie.
Dans lequel il replace la notion d'Utopie dans une perspective du futur au présent ;
débarrassant cette notion du cadre péjoratif qui lui a été imposé après la disparition
des Utopies communistes et libertaires à la fin du XXe siècle.
ARCHÉOLOGIE DU FUTUR. TOME 1 : LE DÉSIR NOMMÉ UTOPIE de Fredric Jameson.
Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Nicolas Viellecazes et Fabien Ollier. Ed. Max Milo, 396 p., 25€

Il est pourtant nécessaire de s'approprier le futur. L'imagination est le meilleur outil pour reformuler le monde.
Cette procédure est souvent critiquée au nom d'un lien étroit avec un réel qui s'exprimerait comme une vérité.
C'est faire peu cas de la complexité de la conscience et de l'imagination,
c'est aussi oublier que la conjugaison du futur possède plusieurs temporalités(futur simple, futur composé,
plus que parfait, conditionnel), c'est aussi ignorer que notre culture doit se penser au futur pour exister.
Le cours de vidéo vous propose une conférence qui permettra d'aborder la création sous un nouveau regard...
En utilisant les méthodes des auteurs d'anticipation et des philosophes analytiques.
Vous découvrirez de nouveaux horizons en lisant la science fiction.
Vous partagerez des questions philosophiques dans des mondes parallèles
et des créatures extratrerrestres.
Vous vivrez ailleurs ou demain durant quelques heures, et vous apprendrez
à formuler des idées inédites.
Le monde ne sera plus comme avant, vous aurez acquis les rudiments
du regard du mutant, du réplicants ou de la vie électronique.
Vous formulerez les possibles à venir, vous ne pourrez plus
voir le monde sous une forme linéaire et causale...
L'exercice que vous propose Sylvie Allouche et Stéphane Trois Carrés
est semblable à celui que l'on pratique en art, en formulant les questions
autrement, en déplaçant le sujet, en modifiant les méthodes de traitement.
Concomitantes à la philosophie, aux écritures spéculatives et à l'art
vous vivrez l'expérience des Think Thank des Universités Américaines
où l'on articule l'expérience et la théorie avec rigueur et imagination.

Des textes seront lus, vous découvrirez de nouveaux auteurs et de nouveaux
concepts et des questions seront soulevées...